Qui ne risque rien n'est rien… sur le chemin de Damas, alors que les opinions ont cédé face aux faits…
on ne le dit assez : un âge n'en chasse pas un autre, tous les âges qu'on a vécu coexistent à l’intérieur de soi, ils s'empilent, et l'un prend le dessus au hasard des circonstances.

samedi 20 juin 2015

SOS Chrétiens d'Orient : Mgr Jeanbart, archevêqe d'Alep lance un appel aux Français


"Vous ne pouvez imaginer comme je suis malheureux d’entendre que certaines armes de ces islamistes viennent de la France…
Un Français ne peut accepter le comportement de vos dirigeants en Syrie !"
Monseigneur Jean-Clément Jeanbart, archevêque grec melkite catholique d'Alep


« La Syrie est une terre sainte irriguée par le sang de millions de martyrs… »


Monseigneur Jean-Clément Jeanbart, archevêque grec melkite catholique d'Alep :
"Vous ne pouvez imaginer comme je suis malheureux d’entendre que
certaines armes de ces islamistes viennent de la France…
Un Français ne peut accepter le comportement de vos dirigeants en Syrie !"

Monseigneur Jean-Clément Jeanbart est archevêque grec-melkite catholique d'Alep. Dans un entretien exclusif accordé à SOS Chrétiens d'Orient, il expose la situation des communautés après quatre années de guerre civile et de terrorisme islamiste, et réaffirme la mission des chrétiens au Proche-Orient. Actuellement, les civils sont directement visés par les combattants de l'État islamique ou d'autres groupes terroristes islamistes qui entourent Alep et tentent de s'emparer de la ville. Mais l'archevêque encourage de toutes ses forces et par son exemple, les chrétiens à rester sur la terre des premières communautés et de la conversion de saint Paul. Pour garantir la survie de l'Église de Syrie, il supplie les Occidentaux de prendre pitié du peuple syrien et de l'écouter avant d'intervenir, pour cesser d'armer ceux qui le tuent.

Charlotte d'Ornellas, pour SOS Chrétiens d'Orient : Quelle est la situation à Alep ces jours-ci ?

D’un certain côté, la situation reste la même qu’avant mais nous sentons qu’il y a des combats aux alentours, il y a une réelle tension. Nous avons reçu plusieurs obus ces derniers jours dans des quartiers aussi bien chrétiens que musulmans, mais dans lesquels l’armée n’est pas présente : ce sont des civils que visent les islamistes qui entourent la ville.

Ch. d'Ornellas : Quel est votre état d’esprit Monseigneur ?

Je suis toujours plein d’espoir, je le place en Jésus Christ et je sais qu’Il ne nous laissera jamais tomber. Mais il est vrai aussi que la situation inquiète tout le monde, à commencer par mes fidèles. Nous craignons que les djihadistes de l’État islamique puissent s’infiltrer dans la ville même s’ils n’y sont pas parvenus jusqu’à ce jour.
En revanche, je souffre. C’est une immense souffrance de voir mes fidèles paniquer et de constater que beaucoup de gens quittent la ville et le pays… C’est ce qu’il y a de plus dur pour un pasteur, surtout lorsque ce dernier croit que nous avons une mission ici, et un objectif apostolique.
Il faut absolument que l’Église reste pour témoigner, nous sommes sur la terre des premiers chrétiens, celle des apôtres… L’Église est née à quelques kilomètres de la Syrie et c’est d'ici qu’elle s’est répandue.
Il y avait une grande tradition à l’époque, et les juifs partaient à Jérusalem. C’est le jour de la Pentecôte que 3000 d’entre eux ont été baptisés avant de revenir en Syrie.
Notre terre est le berceau du christianisme.
Nous avons également l’honneur et la fierté d’être le pays de Saint Paul.
C’est la Syrie qui l’a baptisé, confirmé, et ordonné. Saint Paul nous doit une fière chandelle et il est impossible qu’il nous abandonne, il est évident qu’il intercède pour nous et qu’il n’a pas dit son dernier mot ! Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les islamistes ne parviennent pas à entrer dans Alep, malgré des tentatives depuis trois ans !

Ch. d'Ornellas : Cet amour de la Syrie vous aide à vivre ?

La Syrie est une terre sainte irriguée par le sang de millions de martyrs…
On parle même d’une vingtaine de millions de chrétiens assassinés pour rester fidèles à Jésus Christ sur notre terre, elle est imbibée du sang donné par amour de Dieu.
Ce sont également des milliers d’hommes et de femmes qui ont donné leur vie à Dieu dans ces nombreux monastères et couvent présents partout en Syrie.
Notre histoire, notre terre et notre peuple chrétien sont saints.
C’est la raison pour laquelle je veux aider de toutes mes forces les chrétiens à rester ici, malgré la vénalité de certains pays étrangers, la volonté de domination de ces groupes islamistes et les intérêts défendus par tel ou tel sur le dos du peuple syrien. Aujourd’hui plus que jamais, nous devons résister à la tentation de la fuite parce que nous avons une mission à mener.

Ch. d'Ornellas : C’est pourquoi vous avez décidé de rester à Alep malgré la menace ?

Bien entendu ! Je suis responsable de mes fidèles et je dois être auprès de mon peuple.
Si je m’échappe, comment pourrais-je demander aux chrétiens de rester pour mener notre mission en Syrie ? Je demande chaque jour le courage de rester jusqu’au bout. S’il le faut, Dieu me donnera la force mais il peut également me donner la sagesse de partir le moment venu… C’est Sa volonté que je veux faire.
En attendant, j’encourage les chrétiens, je marche devant mes fidèles et je construis l’avenir que j’attends et espère radieux pour la Syrie. Je rêve d’un pays rayonnant de liberté.
Nous avons vécu l’épreuve du sang, celle du feu, alors nous continuons à vivre en chrétiens malgré la guerre… Nous en sortirons grandis.

Ch. d'Ornellas : Vous avez récemment lancé un appel pour la Syrie, à destination de la France… Qu’attendez-vous ?

J’attends que vous disiez à vos dirigeants qu’ils arrêtent ces machinations qui conduisent à la mort du peuple syrien. Ils nous avaient parlé de démocratie et de liberté, nous n’avons reçu que des mercenaires et des armes ! Ces islamistes détruisent notre pays, nos infrastructures, des trésors… et notre peuple. Ça suffit ! Nous avons découvert le jeu des Occidentaux et nous le refusons.
Je suis d’accord avec des réformes, je veux aussi un pays libre, un peuple digne… Mais nous n’avons que des destructions. Nous ne savons pas ce que vos dirigeants veulent exactement, mais nous, peuple syrien, voulons la paix. Vous ne pouvez imaginer comme je suis malheureux d’entendre que certaines armes de ces islamistes viennent de la France…
Vous appartenez à la nation française et vous devez défendre la dignité de la France : un Français ne peut accepter le comportement de vos dirigeants en Syrie !
Que les chrétiens prient pour nous, sans cesse, et que tous les hommes de bonne volonté joignent leur cri au notre pour réclamer la paix. Nous avons également besoin d’un soutien matériel car les temps sont durs, les commerces sont détruits, beaucoup de Syriens ont perdu leur maison et leur travail…
Nous subissons les horreurs de milliers de mercenaires occidentaux, turcs, arabes qui ne sont pas d’ici et qui ne parlent même pas notre langue ! Comment peuvent-ils prétendre défendre le peuple syrien ?
Cette hypocrisie n’a que trop duré : haussez la voix pour répéter sans cesse que les Syriens ne méritent pas cette guerre atroce. Ayez pitié de notre peuple !
Il est temps de trouver une solution politique avec les personnes concernées : les étrangers n’ont aucun conseil à donner au peuple syrien.
Si ces étrangers veulent nous aider, ils sont les bienvenus. S’ils sont là pour que des hommes continuent à mourir, pour que les chrétiens continuent à partir, alors nous ne l’accepterons jamais.
Nous continuerons à rester et à témoigner de notre joie d’être chrétiens.



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