Qui ne risque rien n'est rien… sur le chemin de Damas, alors que les opinions ont cédé face aux faits…
on ne le dit assez : un âge n'en chasse pas un autre, tous les âges qu'on a vécu coexistent à l’intérieur de soi, ils s'empilent, et l'un prend le dessus au hasard des circonstances.

jeudi 28 mai 2020

Crève Tambour : "Juillet 1916"… Lorsque tombèrent les premiers hommes…




Lorsque tombèrent les premiers hommes
Les feuilles aussi se mirent à chuter
Dans les tristes plaines de la Somme
Jamais plus arbre n'osera bourgeonner

Et la sourde pluie glacée de fer,
Labourant les longs champs fanés,
A puni de cette ébauche d'enfer
L'orgueil des fols étendards levés

Mais dans cette terre noyée de sang,
Par la puissance des larmes versées,
Sur l'immense stèle des gisants
Une fleur s'est remise à pousser.

Lorsque tombèrent les premiers hommes
Les feuilles aussi se mirent à chuter
Dans les tristes plaines de la Somme
Jamais plus arbre n'osera bourgeonner

Les jeunes peuples ainsi immolés,
En un éclair privés de vie,
Quittèrent leur Europe suicidée
Aux cris de victoire des yankees

Mais dans cette terre noyée de sang,
Par la puissance des larmes versées,
Sur l'immense stèle des gisants
Une fleur s'est remise à pousser.

Cette pousse, c'est le cœur rebelle
Qui rejetant toutes facilités,
Fidèle aux vieilles patries charnelles,
Se bat pour l'Europe libérée

Cette pousse, c'est le cœur rebelle
Qui rejetant toutes facilités,
Fidèle aux vieilles patries charnelles,
Se bat pour l'Europe libérée

Mais dans cette terre noyée de sang,
Par la puissance des larmes versées,
Sur l'immense stèle des gisants
Une fleur s'est remise à pousser.

Le long des quais il n'y a plus rien
Pas même un murmure ou un refrain
Le cœur des hommes a déserté
Ce beau souvenir devenu musée.

Paris n'est plus qu'un théâtre d'ombres
Où tout s'écroule et tout sombre
Dans le néant indifférencié
D'un magma d'hommes sans identité.
Des fantômes toujours en retard
Si pressés d'arriver nulle part
Descendent des avenues aseptisées
Cimetières géants aux enseignes dorées.

Richesses et misères se croisent
Réussites et échecs se toisent
Plus personne à qui parler
Plus de mémoire à partager.

Briller un peu plus que le voisin
Tel est le seul et unique dessein
Des clones tristes et frustrés
Qui font semblant d'exister.

Ils sont les symptômes du temps
Ils n'ont ni femmes ni enfants
Chaque jour un peu plus gris
Une seule issue : quitter Paris.


*   *   *




Trente ans aux forges courbé
Et un matin juste une lettre
Cher Monsieur vous êtes licencié
Jamais vous ne toucherez votre retraite

Vengeance des machines exécrées
Plus besoin d'hommes pour les servir
Ou des cohortes moins payées
Des lointaines provinces de l'Empire

Cols bleus à jamais remisés
Sur ordre d'un anonyme patron
Au rayon des inutiles antiquités
Le comptable a toujours raison.

Misère et ennui comme horizon
Les mains calleuses sont sacrifiées
Au rebut forçats de la production,
Place au tertiaire et ses minets !

Pays déjà privé de soldats
Et désormais de travailleurs
Ton ciel est décidément bien bas
Qui défendra encore l'honneur ?


*   *   *




Au fond d'un gouffre
Vivait un humain
En haut du gouffre
Jappait un chien

Le chien était libre
L'homme ne l'était pas
Tous deux étaient ivres
Mais ne le savaient pas

L'un ivre d'immensité
L'autre d'enfermement
L'un baigné de clarté
L'autre de noirs tourments

Roi d'un monde inconnu
Le chien sans but gambadait
Esclave d'un lieu trop connu
L'humain ne pouvait que pleurer

Mais d'espoir d'évasion
L'homme se nourrissait
Quand d'ennui sans passion
Le chien dépérissait

Et le chien bientôt mort
Enviait l'humain enfermé
Capable d'agir sur son sort
Apte à se battre et à rêver.


*   *   *




















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